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Lettres à la France
12 avril 2008

Troisième Lettre aux Francais d'hier et surtout d'aujourd'hui

Et tout spécialement à Monsieur Bernard Kouchner…

 

Il est des hommes, Monsieur Kouchner, dont la France pouvait souvent se sentir fière. Des hommes qui osaient défendre une cause, avec une passion, une férocité une énergie digne des idéaux qui l’ont créés. Vous étiez de ces hommes, monsieur Kouchner. Vous étiez un homme politique, engagé, dont on pouvait par bien des actes être fier : Lorsque vous avez sorti ce livre admirable avec l’Abbé Pierre, lorsque vous fondez Médecins sans Frontière, puis Médecin du Monde. Lorsque vous portez ce sac de riz au sahel, dévasté. Vous étiez alors un représentant des idéaux d’une République Française digne de ce nom.

Et puis le temps a passé, Monsieur Kouchner. Aujourd’hui, de vos engagements si beaux du passé on ne voit plus subsister que quelques braises qui s’éteignent chaque jour un peu plus. Vous cédez aux compromis, vous sacrifiez des idéaux à la carrière. Ne niez pas, Monsieur Kouchner, c’est la seule raison qui peut expliquer vos positions actuelles. Sinon l’autre raison serait que vous avez perdu la raison.

Aujourd’hui, Monsieur Kouchner, on ne peut plus être fier de l’homme politique que vous êtes. On ne peut qu’être affligé devant chacune des tristes compromissions de chacune de vos interventions. Il fut une époque, Monsieur Kouchner, où vous auriez été le premier debout pour défendre les droits de l’homme dans ce pays lointain. Il fut une époque, Monsieur Kouchner, où vous auriez été le premier à vouloir arrêter  cette flamme olympique. Il fut une époque, Monsieur Kouchner, où vous auriez été le premier à vous scandaliser de voir une police chinoise ordonner sur la terre de France, donner des ordres, désigner les gens à frapper, les journalistes à virer. Enfin, il fut une époque où, Monsieur Kouchner, vous seriez déjà parti là bas, pour agir, pour vous battre quelque part.

Vous allez répondre que cela n’est pas raisonnable. Que cela n’est pas concevable.  Que des intérêts politiques demandent cette prudence de position, cette condamnation à peine murmurée…

Et pourtant Monsieur Kouchner, vous écriviez bien des jolies choses en 1993, dans votre préface de « Tibet, l’envers du décor… ». Je vais vous rafraichir la mémoire, Monsieur Kouchner : en 1993, vous écriviez : « Des cris étouffés s'élèvent de ces montagnes et de ces hauts plateaux. Une population hurle silencieusement vers nous: les Tibétains. Un homme nous tend la main: le Dalaï-Lama. Le Tibet souffre de nos timidités et de nos conformismes. Le Tibet risque de mourir de nos silences… » et encore plus loin dans cette même préface : « …Et le Tibet est hermétiquement clos aux journalistes. Les envahisseurs chinois ont compris que le premier ennemi de l'oppression demeure l'information. Dès lors pourquoi s'engager et surtout comment protester si on ne sait pas ce qui se passe? D'autres barbaries sollicitent les indignations. La conscience est en panne. Peut-on prendre l'ensemble du malheur de la planète sur soi ?... Oui. Nous le devons. Ne pas s'indigner devant l'oppression, c'est plier l'échine et se résigner. En tout cas laisser mourir les autres… »

Mon dieu, Monsieur Kouchner, quelle insondable pacte, quelles horribles manipulations a pu vous conduire à oublier ces mots. Tel Faust vendant son âme, vous avez vendu vos idées, votre engagement sans compromission au Dieu Profit ? Vous laissez donc mourir un peuple, pourvu que cela  paie ? Vous voulez attendre le développement de la situation ou juste sa fin… Je n’enfoncerai pas le clou, Monsieur Kouchner, en citant ce que vous écrivez sur le Dalaï Lama dans cette préface. En vous écoutant, prenant mille précaution à l’assemblée nationale parler de lui, suggérant presque qu’il pourrait être l’agitateur, le terrorisme que la chine dénonce, on ne sait pas, à votre connaissance non, mais enfin tout de même on ne peut pas dire.

Voilà pourquoi, Monsieur Kouchner, la France n’a plus d’autres choix que d’avoir honte de vous aujourd’hui. Honte de votre trahison, honte de votre compromission. Honte de ce que vous êtes devenus, vous qui osez même dire que les droits de l’homme ne sauraient donner de conditions à la Chine.

Et au-delà de la honte, Monsieur Kouchner… ?

 

J’étais fier pour Paris. Fier pour les mots de messieurs Delanoë et Mamère, fier de voir des français manifester, des hommes politiques proclamer leur attachement aux droits de l’homme… Mais j’avais honte pour l’homme qui nous représente, honte de vous incapable même d’hausser la voix… Honte et pire même…

Vous voyez, Monsieur Kouchner, vous terminez votre préface de « Tibet, l’envers du décors » en écrivant ceci : « En ces temps de certitudes brisées et de triomphe apparent de la Démocratie, alors que partout exclusions et nationalismes se renforcent, nos enfants nous jugeront sur notre attitude face aux malheurs des Tibétains… »

C’est chose faites Monsieur Kouchner. Des enfants de France vous jugent sur votre attitude face aux malheurs des tibétains… Et ils sont tristes de vous voir coupable.

 

 

PS :

Source : « Tibet, l’envers du décor » Préface de Bernard Kouchner, Auteur Collectif, Edité aux éditions Olizane.

Vous pourrez lire le texte de cette préface sur : www.lepost.fr/article/2008/04/10/1179234_bernard-kouchner-le-tibet-meurt-de-nos-silences.html

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